Histoire du Canton de Vaud

Par Auguste Verdeil (1795-1856)

(Lausanne, Martignier et Compe., 1849-1852)



LIVRE QUATRIEME


LE PAYS DE VAUD SOUS LA DOMINATION DE BERNE.

XVIe, XVIIe ET XVIIIe SIECLES.


Chapitre XVI.

Les Vaudois à Villmergen.

1712.


§ 2. Bataille de Bremgarten.

Organisation de l'armée en divisions et en brigades. — Ordre du jour. — Marche sur Bremgarten. — Le général de Sonnenberg et l'armée des cinq Cantons. — Les deux armées sont en présence. — Les grenadiers de Portefaix. — Les dragons du baron de La Sarra. — L'aîle droite est battue. — L'armée est sauvée par l'aîle gauche. — Victoire de Bremgarten. — Désorganisation de l'armée ennemie.

La prise de Mellingen, et la jonction des armées de Berne et de Zurich sur la Reuss, rendaient ces villes maîtresses du territoire compris entre la Bunz et la Limmat. Cependant, Bremgarten et Baden restaient entre les mains des cantons catholiques, dont l'armée principale, sous les ordres du général de Sonnenberg, campait en avant de Bremgarten. Les communications entre Berne et Zurich n'étaient donc point assurées; Arau et Lenzbourg étaient menacés, et même Zurich, dégarni de troupes, était exposé à un coup de main. Il était donc d'une haute importance de s'emparer de Baden et de Bremgarten. Les généraux zurichois, voyant l'infériorité de leurs troupes, et craignant ainsi de se mesurer en rase campagne avec Sonnenbourg, proposèrent de mettre le siège devant Baden, défendu par un millier d'hommes. Comme le conseil de guerre bernois insistait pour que l'on attaquât Sonnenberg, ce conseil demanda les ordres de son gouvernement, auquel il soumit les deux plans de campagne. «Mais la réponse fut ambiguë.» Cependant, après une nouvelle conférence, les états-majors de Berne et Zurich décidèrent de marcher sur Bremgarten.

Pendant ces discussions, l'armée bernoise recevait de nouveaux renforts. Le commandant de Loys arrivait avec l'escadron des cavaliers d'hommage du Pays de Vaud, escortant un parc d'artillerie et un convoi de munitions, et le baron de La Sarra entrait en ligne «avec sa belle compagnie de dragons du Pays de Vaud.» De nouveaux bataillons avaient rejoint : celui de Genève était en marche; mais ceux de Neufchâtel refusaient de prendre l'offensive contre Lucerne, parce que cette ville avait un traité de combourgeoisie avec Neufchâtel. Même lorsque le général Tscharner donna l'ordre à leur chef d'occuper le Meiengrun, que le bataillon d'Arnex avait quitté pour entrer au camp de Mellingen, ce chef, le colonel Petitpierre, refusa d'obéir.

Ensuite de ces mouvements de troupes, l'armée de Berne, destinée à marcher sur Bremgarten, avait vingt bataillons de quatre cents hommes, officiers et sous-officiers non compris, et cinq cents hommes de cavalerie, format un total de huit mille et trois cents hommes, répartis dans l'ordre de bataille suivant :1

ORDRE DE BATAILLE.
 


 
Le colonel MANUEL. Le général TSCHARNER. Le colonel de WILLDECK.
Messeigneurs de la Généralité et du Conseil de Guerre.
 


 
Premier ligne.
Escadrons de dragons. Bataillons d'infanterie. Escadrons de cavalerie.
No 1. Col. DE WATTEVILLE.
No 2. GINGINS DE LA SARRA.
No 1. TSCHARNER.
4 compagnies, 400 h.
No 2. MORLOT.
3 compagnies, 300 h.
No 3. JENNER.
2 compagnies, 400 h.
No 4. KELLER.
2 compagnies, 400 h.
No 5. DE GINGINS D'ECLEPENS.
2 compagnies, 400 h.
No 6. DE GINGINS D'ORNY.
2 compagnies, 400 h.
No 7. CERJAT DE FECHY.
2 compagnies, 400 h.
No 8. CHARRIERE DE SEVERY.
2 compagnies, 400 h.
No 9. DE MEZERY.
2 compagnies, 400 h.
No 10. BUCHER.
2 compagnies, 400 h.

 
No 1. DE LOYS.
No 2. TILLIER.
No 3. DE LANDENBERG.


 
Seconde ligne.
Lieutenant-Général MAY.   Lieutenant-Général de SACCONAY.
Escadrons de dragons. Bataillons d'infanterie. Escadrons de cavalerie.
No 1. HACKBRET.
No 2. JENNER.
No 1. DE MULLINEN.
2 compagnies, 400 h.
No 2. WATTEVILLE.
2 compagnies, 400 h.
No 3. KILCHBERGER.
2 compagnies, 400 h.
No 4. DE CHAMPVENT.
2 compagnies, 400 h.
No 5. FANKHAUSER.
2 compagnies, 400 h.
No 6. STURLER.
2 compagnies, 400 h.
No 7. QUISARD D'ARNEX.
4 compagnies, 400 h.
No 8. DAMOND.
4 compagnies, 400 h.
No 9. DIZY.
4 compagnies, 400 h.
No 10. REGIS.
4 compagnies, 400 h.

 
No 1. D'EFFINGER.
No 2. DE MOLLENS.

Le 24 mai, l'armée faisait ses préparatifs de départ; elle était organisée en brigades, et l'ordre du jour suivant lui annonçait une campagne sérieuse :

«Ordre du jour : Le 25 mai, à la pointe du jour, tous les tambours de l'armée battront la générale, et les trompettes sonneront le boute-selle, ou le rassemblement s'il est ordonné.

«L'armée se mettra en marche sur deux colonnes, dans l'ordre suivant :

«La colonne de droite, commandée par le lieutenant-général de Sacconay, et les chefs de brigade Tscharner et de Gingins d'Eclépens, sera composée des bataillons Tscharner, Morlot, Jenner et Keller, formant la première brigade, et des bataillons de Gingins d'Eclépens, de Gingins d'Orny, Cerjat de Féchy, Charrière de Sévery, de Mézery et Bucher, formant la seconde brigade. La cavalerie de la colonne de droite sera formée par les compagnies de Loys de Cheseaux, Tillier et Landenberg.

«La colonne de gauche, commandée par le général May, et les chefs de brigade de Mullinen et Régis, sera composée : des compagnies de dragons Hackbret et Jenner, des bataillons de Mullinen, de Wattewille, Kilchberger, Diesbach de Champvent, Stürler, Quisard d'Arnex, Damond de Nyon, d'Arbonnier et Régis, et des compagnies de dragons Effinger et de Mollens.

«L'artillerie marchera sur la grande route, suivie des bagages, et escortée par le bataillon Fankhauser. Les pionniers, divisés en trois détachements égaux, marcheront en tête de l'artillerie et des deux colonnes.

«Lorsque les tambours battront la générale, les grenadiers de chaque compagnie d'infanterie se rassembleront au centre de l'armée, et se mettront sous les ordres des colonels Portefaix d'Yverdon, et Damond de Nyon, et seront répartis en compagnies commandées par six capitaines, six lieutenants et vingt sergents2.

«Défense de tirer soit en marche, sout au départ, ou à l'arrivée au campement; défense d'incendier les baraques ou la paille des campements, de sortir des rangs, ou d'aller en maraude : le tout sous peine de passer par les verges.

«Défense, sous peine de mort, d'attaquer les églises, de s'emparer des ornements sacrés, de renverser des croix, de briser des portes ou des fenêtres d'habitations, de piller ou d'incendier.

«Pour faire le fourrage et la paille, on doit s'y rendre en bon ordre, et sous escorte.»

Le général Tscharner, après avoir pris ces dispositions, faisait sommer Bremgarten. Le général de Sonnenberg. commandant l'armée catholique, envoyait au quartier-général bernois, un parlementaire, demander une conférence dans le couvent de Gnadenthal sur la Reuss. Elle était accordée, et le 26, à six heures du matin, le colonel Amrhyn et le capitaine Mohr, délégués de Sonnenberg, proposaient un armistice de vingt-quatre heures, et la neutralité de Bremgarten et des Bailliages-Libres. Les délégués bernois consentaient à reconnaître la neutralité demandée, mais, sous la condition que les troupes catholiques évacueraient Bremgarten et les Bailliages-Libres, et que les Bernois mettraient une garnison dans Bremgarten. Quant à l'armistice, il était refusé. Les officiers lucernois ne pouvant accepter ces conditions, la conférence fut immédiatement rompue, avec des menaces réciproques : «Nous marcherons sur Bremgarten! — Venez! Vous y trouverez à qui parler!» répondit le colonel Amrhyn. A la nouvelle de la rupture de la conférence, l'armée bernoise se mettait en marche, à huit heures du matin.

La route de Mellingen à Bremgarten, que devait suivre l'armée, suit la rive gauche de la Reuss, passe devant le cloître de Gnadenthal, traverse le village de Goslicken, où elle se bifurque. La route principale suit la hauteur, traverse des bois, puis une plaine assez ouverte et conduit à Bremgarten. L'autre route, qui n'est réellement qu'un sentier, traverse Fischbach, et suit la rive gauche de la Reuss, sur un terrain coupé de ruisseaux et d'étangs et parsemé de bois. Arrivée à Goslicken, la colonne, ou aîle droite, sous le général de Sacconay, suivait, avec l'artillerie et les bagages, la route principale; et la colonne de gauche, sous les ordres du général May, prenait le sentier de Fischbach, pour continuer sa marche sur Bremgarten.

Cependant, le général de Sonnenberg, après avoir réuni environ douze mille hommes, décidait de livrer bataille en avant de Bremgarten. Il plaçait les brigades lucernoises en ligne des deux côtés de la grande route, derrière des haies vives, et sur un plateau qui domine la grande route, ainsi que le chemin de Fischbach à Bremgarten, que suivait le colonne May. Profitant habilement de la forme du terrain, il appuyait ses deux aîles par de l'artillerie, placée aux deux extrémités du plateau occupé par son armée, et mettait douze cents tireurs des Baillaiges-Libres en embuscade, dans un bois au couchant du chemin que Sacconay devait suivre avec l'aîle droite de l'armée bernoise. Le général de Sonnenberg avait donc sa droite appuyée sur la Reuss, et sa gauche sur les bois. Ainsi l'armée bernoise, pour aborder Bremgarten, devait nécessairement emporter les lignes lucernoises par une attaque de front, praticable seulement par les deux chemins qui traversaient le terrain entre Bremgarten et Mellingen, terrain tellement boisé, qu'il n'offrait aucun espace pour y former une ligne de bataille, et utiliser la cavalerie.

Arrivée en face du bois, la division Sacconay rencontre un avant-poste lucernois qui se retire, en lâchant quelques coups de feu. On ordonne une courte halte, pendant que les grenadiers de Portefaix étaient envoyés en avant pour fouiller le bois et en chasser les ennemis. Cependant, malgré les ordres de leurs chefs, les grenadiers ne se répandent point en tirailleurs pour éclairer la marche, mais s'avancent sur le chemin en colonne serrée contre les Lucernois, postés vis-à-vis d'eux sur la lisière du bois. Sur ces entrefaits, cent cinquante dragons, commandés par leur colonel, le baron de La Sarra, arrivent au grand trot, dépassent les grenadiers et s'apprêtent à charge les Lucernois, lorsqu'ils sont assaillis sur leur droite par le feu des tirailleurs des Bailliages-Libres, placés en embuscade dans la forêt. Le baron de La Sarra les charge à la tête de ses dragons; il est tué; ses lieutenants, Pache de Morges, du Thon d'Yverdon, de Hennezel et de Rovéréaz, tombent tués ou blessés; trente dragons vaudois partagent le sort de leurs braves officiers. Les grenadiers de Portefaix, également assaillis et tête et à droite, et décimés par le feu d'une batterie lucernoise, se replient, et tombent en désordre sur le bataillon Tscharner, qu'ils entraînent dans leur déroute. Ce spectacle inattendu fait une telle impression sur les bataillons de l'aîle droite, qu'à peine après avoir déchargé leurs armes, ils tournent le dos. Déjà tous ces bataillons plient, déjà l'artillerie, les canonniers et les conducteurs fuient en désordre, abandonnant sur la route leurs pièces et les voitures3, lorsque le général de Sacconay et le chef de brigade de Gingins d'Eclépens, les capitaines de Saussure et Polier de Bottens, rallient les fuyards, reforment les bataillons, se mettent à leur tête, les ramènent au pas de charge contre l'ennemi qui arrivait en désordre, et l'arrêtent par une vive fusillade. Le général en chef Tscharner, dans ce moment suprême, où il voyait son armée sur le point d'être défaite, rallie une compagnie de fusiliers, la ramène à l'ennemi, reçoit une balle qui lui fracasse le bras, mais il continue à donner l'exemple du courage, en restant sur le champ de bataille.

Alors, le combat devient acharné : généraux et officiers combattent comme de simples soldats; dans le défilé, dans le chemin creux, dans chaque buisson, on se bat corps à corps. Cependant, les Lucernois prennent de l'avantage; les soldats de Sacconay cèdent du terrain, lorsque tout est sauvé par l'enérgie du lieutenant-colonel Charrière de Sévery, du dixième bataillon, et de ses deux capitaines Guisan d'Avenches et Duret de Lausanne. Ces braves officiers enlèvent leur bataillon, qui n'avait pas encore été entammé, et, sous une grêle de balles, le conduisent à l'ennemi. Ils perdent beaucoup de monde, mais rejettent les Lucernois dans le taillis. Dans ce moment, le major Davel, premier aide-de-camp de Sacconay, ramène au combat deux bataillons, et donne tête baissèe dans le défilé, où il soutient les efforts du brave bataillon de Sévery, et ramène la victoire dans les rangs des Vaudois.

Tandis que la division de Sacconay était ainsi engagée dans les taillis et dans le défilé tranversé par la grande route de Gosliken à Bremgarten, la division May, formant l'aîle gauche de l'armée, quittait Fishbach, et suivait le sentier qui conduit de ce village à Bremgarten, en longeant la rive gauche de la Reuss. Voyant que la division Sacconay, ou l'aîle droite, perdait du terrain et était refoulée sur Gosliken, le général May fait faire une à droite à la tête de sa colonne, quitte la route, et se met en bataille dans une prairie, d'où il ouvre une vive fusillade sur la droite des Lucernois. Cependant, comme la batterie de l'aîle droite des Lucernois, ouvrait le feu sur ses lignes, May donne l'ordre aux dragons qui forment sa tête de colonne, de charger cette batterie. Cette manoeuvre audacieuse est brillamment exécutée par les deux escadrons Hackbret et Jenner, qui passant sous le feu de la batterie lucernoise, placée près de la Maladrerie, le tournent, s'en emparent, en menaçant les derrières de l'ennemi.

Par cette manoeuvre audacieuse, le général de Sonnenberg se voyait attaqué en flanc par la division May, et, en tête, par la division Sacconay. Néanmoins, ses troupes tenaient avec la plus grande bravoure. Mais ce n'était pas seulement à ces deux attaques que Sonnenberg avait à résister. Le général de Sacconay ayant jugé, dès le commencement du combat, que la position de l'ennemi était trop forte, pour être enlevée par un attaque du front, avait détaché de sa divisions les bataillons Bucher et Cerjat de Féchy, avec ordre de faire, au pas de course, un détour sur la droite, de se glisser par les bois dans la direction de Wohlen, et de tomber sur les derrières de l'ennemi. Bucher et Cerjat remplirent leur missions avec intelligence et audace, et arrivèrent en battant la charge, et en poussant de grands cris, sur les derrières de Sonnenberg, dans le moment même où ce général était attaqué en tête par Sacconay, en flanc par la division May et coupé par les escadrons Hachbert et Jenner. Saisis d'une terreur panique, en se voyant attachés de tous côtés, et entendant crier en arrière que la cavalerie des Welches les entourait et leur coupait la retraite, ils prennent la fuite. En vain le général de Sonnenberg et ses officiers, veulent les retenir sur le plateau, lieu des exécutions, et rétablir le combat avec un bataillon qui n'y avait pas encore pris part, et avec des renforts qui arrivaient : tout est inutile; les milices des Bailliages-Libres, mal armées et très-indisciplinées, jettent leurs armes, rompent les rangs des Lucernois et les entraînent dans leur fuite. La déroute est générale et telle, que Sonnenberg, qui voulait rallier les fuyards à Mouri, ne peut y parvenir. Son armée se disperse dans toutes les directions pendant la nuit : le lendemain, elle n'existait plus. Aussi, le brave et malheureux Sonnenberg dut-il se borner à couvrir Lucerne avec quelques compagnies de ce canton, qui, seules, de toute l'armée catholique, étaient restées fidèles à leur drapeau.

Ce fut ainsi qu'après deux heures d'une lutte acharnée, la victoire passa dans les rangs des Bernois et des Vaudois. Les deux divisions Sacconay et May se réunirent sur la plaine devant Bremgarten, où, malgré la pluie, la fatique du combat, et une marche qui avait commencé à trois heures du matin, les troupes durent bivouaquer en attendant l'assaut. Mais le lieutenant-colonel Muos de Zoug, qui occupait Bremgarten avec une garnison de six cents hommes, ne jugea pas à propos de résister, et se retira pendant la nuit. La ville ouvrit ses portes, et se rendit à discrétion. Le général Wertmuller, commandant l'armée de Zurich, avec laquelle il devait attaquer Bremgarten par la rive droite de la Reuss, n'avait pas osé marcher en avant, trompé, dit-il, par les avis qu'il recevait de toutes parts, que les habitants de la rive droite allaient se soulever. Mais, rassuré par les succès des troupes bernoises et vaudoises, il parut pendant la nuit devant Bremgarten, et entra dans cette ville en même temps que les troupes victorieuses.

Le perte des combattants, dans l'affaire de Bremgarten, fut, comme il arrive toujours, augmentée d'un côté et diminuée de l'autre. Les catholiques estimèrent la perte des Bernois à huit cents hommes tués ou blessés. Les Bernois portèrent à douze cents hommes la perte de l'ennemi. Mais depuis, il fut constaté que la perte des catholiques ne s'élevait pas à plus de cinq cents hommes. La brigade de Gingins d'Eclépens, composée de trois bataillons vaudois, eut quarante hommes tués et cent dix-huit blessés. Le rapport officiel ne parle pas des dragons de La Sarra et des grenadiers qui furent tués dans l'embuscade. Il ne constate que la mort du baron de La Sarra, chef d'escadron, et de son lieutenant de Rovéréaz. Parmi les officiers de l'armée catholique, tués à Bremgarten, il y eut plusieurs Lucernois, officiers en France, qui avaient obtenu des congés pour venir au secours de leur patrie.


1Tous ces détails sur la campagne de 1712 sont extraits de l'ouvrage remarquable de M. le capitaine Emmanuel de Rodt.

2Les grenadiers appartenaient à une arme nouvellement introduite dans les armées, et remplaçaient les enfants-perdus ou les aventuriers, si célèbres depuis les guerres de Bourgogne. Comme eux, les grenadiers étaient des volontaires choisis en entrant en campagne parmi les soldats les plus hardis et les plus robustes. Ils devaient savoir lancer la grenade et manier la hache. Ayant la tête de toutes les attaques et des assauts, où ils étaient chargés de couper et d'abattre les palissades des retranchements ennemis, de lancer les grenades et de faire le coup de feu avec le fusil à baïonnette, les grenadiers étaient donc les soldats les plus exposés de l'armée.

A l'époque de la guerre de Villmergen, les grenadiers avaient reçu un commencement d'organisation; il y en avait huit par compagnie d'infanterie, et ils n'étaient réunis en corps et ne recevaient un état-major qu'au moment de l'action. Quelques années plus tard, on sentit l'inconvénient de cette organisation, et on les forma en compagnies. Parmi les capitaines qui commandaient les six cents grenadiers dans la campagne de Villmergen, quatre étaient du Pays de Vaud : MM. d'Arbonnier, de Crousaz, Mayor et Duret.

3Le désordre fut tel que le conseiller Escher, représentant de Zurich au quartier-général, écrivit à son gouvernement : «Aux cris partis de la forêt : Les voici! les bataillons se débandèrent, et les officiers généraux, avec lesquels j'étais, entendant siffler les balles, prirent les premiers, au grand galop, le chemin de Mellingen, entre autres le banneret Kirschberguer, seigneur de la généralité, criant à tue-tête : Sauve qui peut! mais comme le chemin était barré par l'artillerie, Monsieur le banneret faillit s'y casser le cou..... Mais après la victoire, on vit ces officiers généraux les plus fiers à la tête de l'armée.»


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